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Lualaba : Des citoyens dans la boue, des autorités dans le silence à Kolwezi

À Kolwezi, dans le quartier Kasulo, l’avenue Dilolo n’est plus seulement une voie de circulation : elle est devenue le symbole d’un profond abandon institutionnel et, paradoxalement, d’une résilience populaire admirable. Nids-de-poule, poussière suffocante en saison sèche, bourbiers en saison de pluie : ce tronçon pourtant stratégique, qui relie le marché central CDM à d’autres axes vitaux de la ville, s’est transformé en cauchemar quotidien pour ses usagers.

Ce n’est pas une histoire nouvelle, et c’est bien là le drame. Les appels à l’aide se sont succédé, restés sans réponse. Devant l’inaction persistante de l’État, les habitants ont décidé de ne plus mendier l’attention de leurs représentants. Pelles, pioches et sacs de béton à la main, ce sont eux qui, aujourd’hui, redonnent vie à cette route délaissée. Une action citoyenne qui force le respect, mais qui soulève une question fondamentale : à quoi sert l’État, si les citoyens doivent eux-mêmes reboucher les trous de la République ?

La souffrance économique est palpable. “Chaque jour, je répare mon véhicule, mais jusqu’à quand ?”, s’indigne Monsieur Médard, conducteur de taxi-bus. Pour lui comme pour tant d’autres, la route endommagée n’est pas qu’une gêne : elle est un coût, un danger, un poids qui s’ajoute à une précarité déjà lourde.

Le président national de Rastafari, Abel Bumba Ndala, résume bien le dilemme : “Ce n’est pas aux citoyens de faire ce travail, c’est à l’État d’agir.” Il a raison. Car si la mobilisation des habitants inspire, elle ne saurait devenir la norme. La responsabilité de la réhabilitation des infrastructures publiques incombe d’abord aux institutions. Quand elles se taisent, c’est tout le contrat social qui vacille.

Et pourtant, il y a dans cette initiative une leçon d’humanité, une démonstration de ce que peut une communauté unie. Sans ressources mais avec détermination, les habitants de Kasulo rappellent à ceux qui gouvernent qu’il n’est jamais trop tard pour écouter. Et qu’en attendant leur réveil, le peuple continue d’avancer — parfois les mains dans le béton, les pieds dans la boue, mais le cœur tourné vers un avenir meilleur.

Kolwezi mérite mieux. Kasulo mérite l’attention. L’avenue Dilolo mérite d’être traitée comme ce qu’elle est : une artère de vie, et non un symptôme d’oubli.

Alix UMBA

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