#Politique

24 avril 1990 : Le jour où Mobutu ouvrit la voie au multipartisme au Zaïre

Par gazetteinfos.net

Un discours historique devant la nation


Le 24 avril 1990, une date qui marque un tournant décisif dans l’histoire du Zaïre (actuelle République démocratique du Congo). Ce jour-là, le Maréchal Mobutu Sese Seko, chef de l’État depuis plus de deux décennies, prononce un discours inattendu depuis le Palais de la Nation à Kinshasa. Vêtu de son uniforme noir de maréchal, devant un parterre de hauts dignitaires — ministres, généraux, magistrats et parlementaires — il annonce la fin du monopartisme.
Dans une posture solennelle, il déclare « avoir décidé seul devant sa conscience de tenter l’expérience du pluralisme politique », mettant fin à l’hégémonie du MPR (Mouvement Populaire de la Révolution). Ce virage inattendu autorise chaque citoyen à adhérer au parti politique de son choix, un principe inédit dans un État marqué jusque-là par le parti unique.

Un symbole de libération, des pleurs d’un dictateur


La nouvelle fait rapidement le tour du pays. Le soir-même, les Zaïrois expriment leur euphorie en ressortant pantalons et cravates, interdits à l’époque du retour à l’authenticité prôné par Mobutu.
Malgré son image d’homme fort, surnommé le « Vieux Léopard », Mobutu ne cache pas son émotion. En direct à la télévision, il pleure. Pourquoi ces larmes ?
Le contexte international explique en partie ce basculement : la chute du mur de Berlin en 1989 annonce la fin de la guerre froide. Mobutu, autrefois soutenu par les puissances occidentales comme rempart contre le communisme, perd ses alliés. Isolé, affaibli, il n’a d’autre choix que d’ouvrir le jeu politique.

Le début de la fin d’un régime


Cette ouverture au multipartisme entraîne la convocation de la Conférence nationale souveraine (CNS), rassemblant des représentants de toutes les composantes de la société zaïroise, y compris la diaspora. Véritable tribune de vérité, la CNS met en lumière les dérives du régime. Les prises de parole d’opposants comme Étienne Tshisekedi se multiplient, sans répression cette fois. Le pouvoir de Mobutu vacille.

Un pouvoir à l’agonie, un règne qui s’effondre


À mesure que la crise politique s’intensifie, la situation économique se dégrade. Le trésor public est exsangue. Mobutu, rejeté dans les rues de Kinshasa, se retire dans son palais caché à Kawele. La maladie – un cancer de la prostate – accentue son isolement, alors que ses adversaires politiques et militaires gagnent du terrain.

En 1991, à la suite de violences à Kinshasa et de l’assassinat de l’ambassadeur de France, les soutiens militaires occidentaux quittent le pays.
En 1996, dans un contexte régional bouleversé par le génocide rwandais, une rébellion menée par l’Alliance des forces démocratiques pour la libération (AFDL) et soutenue par le Rwanda entre au Zaïre. Le 17 mai 1997, Mobutu est renversé. Il fuit en exil et s’éteint trois mois plus tard à Rabat, au Maroc.

Le discours du 24 avril 1990 reste l’un des moments les plus marquants du règne de Mobutu. Si cet acte a ouvert une brèche vers la démocratisation, il a aussi annoncé la lente agonie d’un pouvoir autrefois tout-puissant. Trente-quatre ans plus tard, cette date résonne encore comme le symbole d’un changement espéré, mais inachevé.

Denis BABI WA MULUMBA

24 avril 1990 : Le jour où Mobutu ouvrit la voie au multipartisme au Zaïre

Kinshasa : Après 23 ans, la justice

Leave a comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *